5
La
vie en communauté.
Caroline tentait
de mettre de l’ordre dans ses pensées. Après cette nuit de noces sans poésie, sans
alchimie amoureuse, dont elle ne se souvenait que de peu de choses, elle
cherchait à savoir le pourquoi du comment. Evidemment personne ne voulait la renseigner,
elle voyait une sorte de crainte dans les yeux des femmes à qui elle posait des
questions. Thomas lui conseilla, pour sa sécurité et son bien, de ne pas parler de choses intimes avec les
« Sœurs ». Intime ! Mais rien n’était intime ! Elle se
souvenait vaguement de personnes en blouses blanches autour d’elle et de la
douleur ressentie. De plus il n’y avait aucune amélioration dans leur relation
personnelle. Pourquoi une telle indifférence ? Pourquoi ne la touchait-il
pas ? Qu’elle était la raison de son indifférence ?
-
ma chérie, la loi de l’Ordre veut que
nous soyons chastes pendant six semaines…
-
Chastes, nous devons rester
chastes ! Tu as vraiment le don de me faire rire ! Quelle ironie
après ce que j’ai subi !
-
Tu comprendras plus tard…Fais-moi confiance.
Caroline sentait bien que cette « société »
bigarrée comportait des éléments disparates, étranges, mais amoureuse de son
mari, elle était encore malléable aux conventions du « Prisme de la
Vérité ». Il faut dire que Thomas jouait à merveilles avec ses émotions. Cependant
elle réalisait que, comme cendrillon sortant de son carrosse après minuit, il
s’était transformé, non pas en citrouille, mais en cellule de prison.
Tous les matins elle se levait à six
heures pour arroser ses plantations diverses, avant le lever du soleil puis
elle se rendait au lavoir car les machines à laver n’existaient pas dans la
communauté. De plus elle avait dû abandonner ses affaires personnelles pour
revêtir la robe conforme attribuée aux femmes, une longue tunique en tissu
grossier qui de temps en temps lui procurait des démangeaisons sous les bras et
sur la poitrine car les soutiens-gorge n’étaient pas de mise non plus. La nourriture macrobiotique ne lui convenait
pas et après un mois, elle se sentit mal. Plus le temps passait, plus elle
déchantait.
Le commissaire Perlicchi comprenait
mal pourquoi elle n’avait pas pris ses jambes à son cou aux premières lueurs de
lucidité. Caroline ne répondit pas tout de suite, puis… Parce qu’elle venait de
s’apercevoir qu’elle… attendait un enfant… Un seul rapport dont elle ne se
souvenait qu’avec horreur, son mari avait une calculatrice dans la
tête ! C’est vrai qu’il lui avait
demandé de multiples détails avant de se marier… Et où était cet
enfant ? Elle ne répondit pas… Les
larmes coulaient sur son visage mais elle continua son récit :
Thomas fut transporté de joie à cette
nouvelle ! Leur nuit de noces avait été prolifique ! Quel
histrion son époux! (Elle repensait
à lui et se dit qu’il était vraiment
grotesque… Un peu fou ce romain !) Néanmoins sa bonne humeur contamina
Caroline qui oublia tout ce qui ne concernait pas cette future naissance. Les
convenances en pareil cas étaient que Caroline prenne soin d’elle et du futur
bébé et ne fasse plus les travaux lourds comme la lessive au lavoir. Les autres
sœurs les feraient pour elle. Etre enceinte n’était pas une maladie !
-
Chut caroline, le mot enceinte est interdit ici… Tu portes un
bébé… Et j’espère que ce sera un garçon…
-
Et si c’était une fille ?
-
Il faudra recommencer jusqu’à la
naissance d’un garçon…
Caroline allait de surprise en
surprise… Ce qui l’énervait le plus c’étaient les mots « sœur » et « frère »
et surtout: « Sœur Uriel » dont on l’affublait ! Elle avait
l’impression d’avoir perdu son identité. Là encore le champion Thomas intervint
pour la rassurer.
-
Sois raisonnable, c’est une facilité
pour nous tous qui avons quitté le monde matériel et utopiste d’antan, nous
devons faire abstraction de cette vie passée pour nous concentrer sur celle que
nous avons aujourd’hui. Il n’y a pas d’alternance possible. N’es-tu pas
heureuse avec moi, avec ce futur bébé ? je t’aime, ne l’oublie jamais,
nous sommes liés pour l’éternité…
A suivre...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire