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Remue-ménage
Mardi indiquait l’éphéméride, journée
qui s’annonçait problématique car si l’hirondelle ne faisait pas le printemps,
les drôles d’oiseaux en tuniques blanches annonçaient eux, une rude saison. Un
vent de panique soufflait sur l’hôtel de police, pas vraiment la morne
plaine ! Les impétueux agents tentaient de faire régner le calme mais les
adeptes du « Prisme de la Vérité » brandissaient des pancartes « Rendez la liberté à notre Maître bien
aimé ! »
Tonio Perlicchi, si fort d’habitude,
commençait vraiment à sortir de ses gongs, il avait un mal fou à se contrôler.
Comble de tout, voilà qu’arrivait Caroline, très élégante, dans un ensemble
marine et capeline assortie. Elle avait particulièrement soigné sa tenue ce qui
indiquait peut-être qu’elle se sentait mieux dans sa peau. Pas facile pour elle
de circuler au milieu des autres en baissant la tête ! Le commissaire
n’avait pas eu le temps de la prévenir du charivari à l’hôtel de police !
Les adeptes ne semblaient pas la reconnaître, il était vrai que le chapeau
masquait un peu son visage et c’était tant mieux ! C’était certain, il
fallait vite la subtiliser des regards et l’installer dans son bureau. Conspiration des évènements en ce jour de
m… ! Quelques mesures de sécurité s’imposaient.
Finalement les hurlements cessèrent
car les tuniques blanches furent poussées vers la sortie par les agents de plus
en plus irrités. Ces dingues vivaient en pleine utopie dans un monde anormal
mais bien réel pour eux. Comment pouvaient-ils croire à ce renouveau immatériel
qui les rendrait heureux ? Aucun ne pensait par lui-même mais au travers
d’une doctrine abêtissante. Les vieux clichés de la réincarnation étaient remis
au goût du jour mais d’une autre façon.
Dans la cellule le « maître »
protestait, quant à Thomas, il avait la
couleur citron de l’ictère comme si la bile lui montait au visage ! Il
venait de s’apercevoir que la belle inconnue était Caroline. La voir si belle
et inaccessible lui remuait les entrailles. Il hurla « Dès que l’avocat nous sortira de ce bourbier, tu te retrouveras
dans les catacombes, car un jour ou l’autre nous t’aurons ! Tu
connais bien ce lieu ! La belle vie ne va pas durer !»
Tonio Perlicchi fixa la jeune femme,
elle était à la limite de l’évanouissement, toute son assurance avait disparue.
Le commissaire comprit aussitôt le danger et ferma la porte en demandant à ne
pas être dérangé.. Ce lieu existait-il car lors de la perquisition personne
n’avait rien remarqué ? Elle hocha tristement la tête…Oui ce lieu
satanique était une réalité. Voulait-elle en parler ? Oui…
Caroline respira un bon coup et
commença : Les catacombes étaient sous la maison des punitions. Une trappe,
dont le grincement faisait frissonner de peur, donnait sur un souterrain
uniquement éclairé par des chandelles. L’ombre des corps longeant le long
couloir devenait effrayante. Caroline se souvenait de son unique séjour dans ce
sinistre endroit. Elle avait tenté de se rebeller quand tomba l’interdiction de
parler à son fils pendant son instruction qui durerait six mois. Comme elle se
battait griffes et ongles pour récupérer Mickael, elle fut d’abord envoyée dans
la maison des punitions et mise en quarantaine. Restriction la plus souple de
l’Ordre. Comme cela ne la calmait pas, elle se retrouva dans les catacombes. Le
but était de la rendre vulnérable par la peur de ce qui pouvait se passer dans
l’ombre de ces arcades. L’amour pour son fils étant la plus forte, ils
décidèrent de la mâter par la force.
« Ils » ? Les adeptes
du cinquième degré. Thomas tenta d’intercéder en sa faveur mais en vain.
Pourquoi soudain s’inquiétait-il pour elle ? Elle ne s’en préoccupa guère…
Après une boisson étrange et un comprimé qu’ils lui enfoncèrent de force dans
la gorge, elle perdit pied. Tous ses membres ankylosés ne répondaient plus aux
ordres de son cerveau. Des images défilaient sur un écran faisant le tour de la
pièce circulaire et des paroles s’en suivaient mais elle ne s’en souvenait
plus. C’était un lavage de cerveau en règle ! Ajoutée à cela une diète
imposée pendant plusieurs jours, toute volonté la quittait. Elle sortit de cet
endroit, brisée physiquement et moralement. Une seule chose l’avait sauvée de
l’abrutissement total, à partir du second jour : l’autosuggestion. Elle se
répétait sans cesse « Je suis forte,
mon cerveau résiste aux mensonges, la vérité est ailleurs… » Si bien
qu’elle n’enregistrait pas tout ce qu’elle entendait… Ce fut très dur mais sa
volonté fut la plus forte. Ensuite elle fit semblant d’être différente et
commença à préparer sa fuite. Cependant les séquelles étaient là, elle eut des
nausées très longtemps.
Reconnaitrait-elle les responsables
de sa détention dans les catacombes ? Oh oui ! Un élément de plus
dans le dossier se dit le commissaire…
A suivre…
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Un récit très intéressant, j'aime.
RépondreSupprimerpauvre caroline, elle est bien costaude tout de même avec tout ce qu'elle a déjà enduré
RépondreSupprimerj'aime bien cette histoire